Fin de classe
Qu'est-ce qui cloche ?
Fin de classe : oui, youpi les vacances !
Sauf que moi, je déteste les fins. Et encore plus les adieux. Je n’ai jamais aimé ça. Je n’aime pas dire au-revoir, tout simplement. Je crois que je tiens cela de ma mère… C’est nul !
Vacances et n’empêche que j’ai un petit pincement au cœur. Fin du primaire pour moi. Grande aventure l’année prochaine : aller au collège (puis lycée, puis université comme mes illustres prédécesseurs ?)
Je vais devoir dire au revoir à mes copines le temps des vacances. Et même adieu à certaines autres. Bon, il y en a certaines, ça ne me gêne pas du tout de ne plus les voir. C'est le bon côté des choses.
D’autres si. Je me cacherai en montant dans le bus ce soir, pour qu’elles ne voient pas mes larmes. Ça ne se montre pas la peine. Pas en fin de primaire : on est trop grand pour pleurer ! (C'est pas la maternelle !)
Et puis, la maîtresse aussi, elle va me manquer. Je ne pensais pas mais je me rends compte que si. Ça me fait drôle.
Je ne l’ai eue qu'une année, cette année car avant, je la croisais dans la cour de récréation ou lors de sorties ou spectacles en commun, et je ne la connaissais pas bien.
Cette année, avec elle, j’ai apprécié l’école. J’ai tant appris : des maths et du français. Je n’ai pas toujours été très carrée ( toujours les soucis avec la géométrie).Timide comme je suis, elle a réussi à me faire parler un peu, m’exprimer. Bravo !
Etre avec elle était un bonheur. Sa présence me rassurait ( contrairement à la maîtresse de l’année d'avant) ; elle est si calme, si douce. Mais là, c’est la fin. Ne plus la voir me rend triste. Ca ne sera plus pareil, c’est sûr !
"Tiens, je te fais des cadeaux d’au revoir, maîtresse. " (Je crois que c’est la première fois que je fais des cadeaux à ma maîtresse.)
"Je t’offre un bouquet des bracelets. Et un bouquet de fleurs en élastocs".
Voilà, une page se tourne. "Je crois que je ne saurais pas te dire « au-revoir madame ». Encore moins adieu."
Qui sait, je la rencontrerai peut-être dans une galerie marchande au moment de Noël. Ou dans un quelconque supermarché de la région. Le monde est si petit. Donc, je ne dis pas adieu.
Oui, j’ai le cœur gros aujourd’hui. Je ne verrai plus cette petite cour d’école où les mamans entrent pour venir chercher leurs enfants et où elles participent activement à la fête de fin d’année. Une grande famille en quelque sorte. Je n’aurais plus l’occasion de rentrer dans les salles avec de beaux posters aux murs, les alphabets et les dessins d'enfants… Des salles impersonnelles m'attendent, où les parents ne rentrent jamais.
C’est fini tout ça. Tout le monde s’accorde à dire que ça va me changer cette entrée au collège : je vais passer dans le monde des grands. Je n’aurais plus le droit de m’amuser comme avant. Non, je vais être une grande ! Ça ne pleure pas une grande...
Non, je n’aime vraiment pas les fins.
En plus, elles ne vont pas être gaies, ces vacances ! Ma mère est d’une humeur de chien depuis hier !
Elle n’en peut plus de son boulot : elle dit que sa boîte est « une injure à l’intelligence, un affront au bon sens. T’as jamais vu une organisation de merde comme celle-ci », qu’elle ajoute. Elle commence à se demander « quels sont les critères de recrutement du personnel ? » Un truc lui échappe : à tous les niveaux, ça merde, c’est insupportable ! Il faut dire qu’elle s’est déplacée deux fois pour rien cette semaine car les secrétaires (oui, elles sont plusieurs) ont omis de lui dire que les réunions étaient annulées. Deux fois de suite, dans la même semaine, elle s’est cassé le nez ; elle n’apprécie pas ! Je crois qu’elle n’ira pas bosser aujourd'hui. « La semaine prochaine, on verra » qu’elle a dit. Elle est furax !
C’est ça le monde d’adultes qui m’attend ?
J’espère qu’elle va vite retrouver sa bonne humeur sinon, bonjour les vacances !
(Vous n’auriez pas un poste de secrétaire à lui proposer par hasard ? Parce que là, je sens qu’on en a pour des jours de jérémiades. Je ne connais pas ses collègues, mais certains prénoms ne donnent pas envie d’être portés, vous pouvez me croire, vu comment elle les a écorchés !)
Et mon père, donc ! Lui aussi ne va pas être à la noce si ma mère fait la gueule. C’est l’effet boule de neige. Elle râle, il s'énerve après moi : ambiance ! D’ailleurs, j’en profite pour faire passer un message à mon petit voisin.
« Mon père, il a dit que si tu fais le mur pour venir ici, il sort la tronçonneuse. C’est clair ? »
Je crois que c’est tout pour aujourd’hui.
Ça promet les vacances !
Je vais aller chialer dans mon coin, pendant que ma mère râle et que mon père surveille le voisin.
(Euh, pour ma mère, même dame pipi, ça pourrait lui convenir, j'en suis sûre ! Ça existe encore dans les gares, non, dame pipi ? )
Tant que j'y pense, je vais aller planquer la tronçonneuse ; faudrait pas qu'elle l'emporte au boulot la semaine prochaine !
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